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AMITA MICHAELA

 

« Heus ! Quomodo te habes hodie, amita  Michaela ?

- Equidem nescio unde id accidat : fere mensem jam plenum vix possum cruribus  consistere. Nullum robur. Me sentio exhaustam ! Praeterea, non possum quin semper oscitem . Nescio unde id accidat.

-  Num adeas medicum ?

- A ! Ecastor ! Mene adire medicum ! Praeterea, interdum ante oculos aliqua nubes praeterit et aliquando tam surda sum quam olla . Nescio unde id accidat. Praeterea minime esurio  sed sum cordolens  ! Mihi haec adversa  dens, specta, movetur sicut tintinabulum .

- Num ea extrahatur ?

- A ! Ecastor ! Extrahatur ! Malo eam ipsam cadere... Nescio unde id accidat, semper dormire cupio ; noctu autem vix dormio, et istae noctes longae sunt, tam longae quam amplissima dies.

- Num fervefacias  papaveris  granum ?

-  A ! Ecastor ! Papaveris granum ! Tibi addam : nostra parva Francisca hodie mane mihi adtulit tenerarum fabarum pugillum  quas a pueritia maxime dilexi ! Paucum piperis , satis salis, venula  aceti, bonusque modus olei, nihil est melius. Attat ! Laborat  etiamnunc stomachus. Oneratur !

Nescio unde id accidat… Tantas patior adustiones  !...

- Audidum, amita Michaela : quae est aetas tua, nisi sum curiosior ?

- A ! mi puer, aliquantam humeris sustineo, certe aliquantam !

- Quid etiam ?

- Sane ! annum aetatis ingrediar nonagesimum septimum die festo Beati Johannis.

- Quid tibi dicam ?... Nescis unde id accidat ? Forsitan inde accidat, amita Michaela, solum inde accidat !

 
 

  amita, ae : tante (du côté paternel).

  crus, cruris (n.) : jambe, pied.

  oscito, are : bâiller.

  olla, ae : marmite, pot.

  esurio, ire : avoir faim.

  condolens, ntis : qui souffre de l’estomac.

  adversus, a, um : qui se trouve devant.

  tintinabulum, i : clochette.

  fervefacio, ere : faire bouillr.

  papaver, eris  (n.) : pavot.

  pugillum, i (n) : poignée.

  piper, eris (n.) : poivre.

  venula, ae : petite veine, filet (de liquide).

 adustio, onis : brûlure d’estomac

 

JOSEPH ROUMANILLE (1818 – 1891), Provinciales Fabellae, 1884 – 1889.

TANTO MIQUÈLO

 

-    Bèn ! Coume sian vuei, tanto Miquèlo ?

-Iéu sabe pas d’ounte acò vèn : i’a ben uno mesado, aperaqui, que me pode quàsi plus teni sus mi cambo. Ges de forço. Me sènte avanido ! Em’acò de badai que n’en finisson plus. Iéu sabe pas d’ounte acò vèn.

-Se vous fasias vèire ?

-Ah ! ço, vai ! me faire véire ! Em’acò, de fes, me passo coume uno nèblo sus lis iue, e siéu, i’a de jour, sourdo coume un toupin. Sabe pas d’ounte acò ven… Em’acò gaire d’apetis, e de mourimen de cor ! Ai uno dènt aqui-davans, tè ! ve ! que brando coume uno sounaio.

-Se la fasias derraba ?

-Ah ! ço, vai ! derraba ! ame mai que toumbe souleto… Em’acò, sabe pas  d’ounte acò ven, ai toujour som ; e pièi la niue, dorme gaire, e aquéli niue soun longo, longo coume tout vuei !

-Se fasias bouli uno tèsto de pavot ?

-Ah ! ço, vai ! uno tèsto de pavot !... Que te digue : nosto Françoun es vengudo adematin m’adurre uno pougnado de pebroun verd, que lis ai toujour forço ama, forço ! Un pessu de pebre, bèn de sau, un fiéu de vinaigre em’uno bono raiado d’òli, i’a rèn de meiour. Eh bèn ! lis ai encaro sus l’estouma. Me peson ! Iéu sabe pas d’ounte acò vèn… ai d’aquéli cremesoun !...

-Escoutas, tanto Miquèlo : quant avès de tèms, se siéu pas trop curious ?

-Ah ! moun enfant, n’ai bèn quàuquis un sus lis esquino, bèn quàuquis un !

-Mai encaro ?

-Eh bèn, ve, intrarai dins mi nounanto-sèt par Sant Jan.

-Que vous dirai ?... Sabès pas d’ounte acò vèn ? Se pòu qu’acò vèngue d’aqui, tanto Miquèlo, vèngue rèn que d’aqui !

 

Joseph ROUMANILLE (1818 – 1891), Li Conte prouvençau, 1884 – 1889.

 

TANTE MICHELLE

 

- Eh bien ! Comment ça va aujourd’hui, tante Michelle ?

- Je ne sais pas d’où ça vient : il y a bien un bon mois à peu près, que je ne peux presque plus tenir sur mes jambes. Pas de force. Je me sens faible ! Avec ça je bâille sans fin. Je ne sais pas d’où ça vient.

- Si vous allie consulter ?

- Ah ! ça alors ! Consulter ! Avec ça, parfois, il me passe comme un nuage devant les yeux, et je suis, certains jours, sourde comme un pot. Je ne sais pas d’où ça vient… Avec ça guère d’appétit, et des faiblesses de cœur ! J’ai une dent, ici devant, tiens ! regarde ! qui bouge comme une cloche.

- Si vous vous la faisiez arracher ?

- Ah ! ça alors ! Me la faire arracher ! j’aime mieux qu’elle tombe seule… Avec ça, je ne sais pas d’où ça vient, j’ai toujours sommeil ; et puis, la nuit, je ne dors guère, et ces nuits sont longues, longues comme un jour sans pain !

- Si vous vous faisiez bouillir une tête de pavot ?

- Ah ! ça alors ! Une tête de pavot !... Que je te dise : notre Françon est venue ce matin m’apporter une poignée de poivrons verts, que j’ai toujours beaucoup aimés, beaucoup ! Une pincée de poivre, beaucoup de sel, un filet de vinaigre et une bonne rasade d’huile, il n’y a rien de meilleur. Eh bien ! je les ai encore sur l’estomac. Ils me pèsent ! Je ne sais pas d’où ça vient… j’ai de ces brûlures !...

- Écoutez, tante Michelle, quel âge avez-vous, si je ne suis pas trop curieux ?

- Ah, mon enfant, j’en ai bien quelques uns sur le dos, bien quelques uns !

- Mais encore ?

- Eh bien, vois-tu, j’e ntrerai dans ma quatre-vingt dix-septième année pour la Saint Jean.

- Que voius dirai-je ? Vous ne savez as d’où ça vient ? Il se peut que ça vienne de là, Tante Michelle, que ça ne vienne rien  que de là !

 

Joseph ROUMANILLE (1818 – 1891), Les Contes provençaux, 1884 – 1889.

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