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MERULUS ET MERULA

 

Pridie erat Christi Nativitatis ; Jacobus Barral, Paternarum incola, venatum  iverat et merulum  necaverat. Domum veniens :

- Age, Anna cara, uxori dixit, id velle  ad crastinum dies.

- O ! Anna dixit, quam pulchra merula !

- Est merulus, respondit Barral.

- Hem ! Nonne vides eam esse merulam ?

- Ego tibi dico eum esse merulum !

- Tu centies eadem ogganis  !

- At tu es stolidus !

- O ! ista lupatria  ! Ego mox te…

- Ea est merula !

- A ! est merula ? Etiam exspectadum.. !

Et, malum, quantas contumelias , quanta verbera ! Hic volat mitra , illic petasus  ! Qualis vapulatio  ! Dum inter se vapulant, feles merulum rapuit, vel merulam, et se subduxit . Accurredum ad me !

 

II

 

Postero anno, pridie Christi Nativitatis, Barral et Anna posituri erant caudicem  in focum cochleasque  esuri, cum dixit Barral :

- A, Anna, quam stulti fuimus cum inter nos altercati  sumus, proximo anno, eodem ipso die ac hodie, de illo merulo !

- Sane est ut dicis. Nonne dixi eam esse merulam ? Eia age, certe ea erat.

- Erat certissime merulus. Bene scio qui eum necaverim.

- Mi belle, videtur mihi eam conspicere : ea erat merula.

- Denuo de merula ista loqueris ? Quam es tamen obstinatus.

- Quam es pertinax , Jacobe !

- Nonne tacebis, immundities  !

- O ! sordide homo ! facinus sordidum ! Ea erat merula !

- A ! erat merula ! Eho ! te…

Et, malum, quantas contumelias, quanta verbera ! Hic volat mitra, illic petasus ! Qualis vapulatio ! Num crederes tamen septimum jam annum ad Nativitatem permanere ista negotia.

 

Vocabularium

 

   venor, arisa ri, atus sum : chasser.

  merulus, i : merle ; merula, ae : merlette.

  vello, is, ere : vulsi, vulsum : arracher, plumer.

  ogganio, ere, i, itum : radoter, assommer de bavardages.

  lupatria, ae : charogne (injure).

  contumelia, ae : injure.

  mitra, ae : coiffe.

  petasus, i : chapeau.

  vapulatio, onis : série de coups, formé sur vapulo, are : rouer de coups

  subduco, is, ere, duxi, ductum : retirer discrètement

  caudex, dicis (m.) : bûche, souche.

  cochlea, ae : escargot.

  altercor, ari : se disputer.

  pertinax, acis : entêté.

  immundities, ei : saleté.


MERLO ET MERLETO

Èro la vueio de Calèndo ; Jaque Barrau, de Perno, anè cassa, et tuè’n merle. En arribant :

-Tè, Nanoun, fai à sa femo, plumo acò pèr deman.

-Oh ! dis Nanoun, la bello merlato !

-Es un merle, fai Barrau.

-Èhèi ! veses pas qu’es uno merlato ?

-Iéu te dise qu’es un merle !

-E iéu te dise qu’es uno merlato !

-Sies un pico-pebre !

-Sies un pau-de-sèn !

-Oh ! d’aquelo souiro ! tout-aro te…

-Es une merlato !

-Ah ! es uno merlato ? Eh bèn ! espèro…

E foutrin ! e foutrau ! de bacèu, de grafignado ! Couifo d’eici, capèu d’eila ! Quéntis espòussado !

Enterin que s’espòussavon, la cato rapinè lou merle… o la merlato, et s’esbignè. Courre-m’après !

 

II

 

L’an venènt, la bello vueio de Calèndo, Barrau e Nanoun anavon pausa cacho-fió et manja si cacalaus, quand Barrau :

-Que, Nanoun, coume fuguerian bèsti de tant nous espòussa lis argno, l’an passa, tau jour que vuei, pès aquéu merle !

-As proun resoun. Iéu disiéu qu’èro uno merlato, parai ? E, bouto, vai, n’èro segur uno.

-Èro fort bèn un merle. Lou sabe bèn, iéu que lou tuère.

-Moun bèu, me sèmblo que la vese : éro uno merlato.

-Sies mai aqui emé ta merlato ? Que sies cacho-pesou, pamens !

-Coume sies testard, Jaque !

-Te taisaras, chaupiasso !

-Oh ! laid moudèle ! laid travai ! Èro uno merlato !!

-Ah ! èro uno merlato ? Eh bèn ! tè…

 

E foutrin ! e foutrau ! de bacèu, de grafignado ! Couifo d’eici, capèu d’eila ! quéntis espóussado !

E dire, pamens, que i’aura siéis an pèr Nouvè qu’aquéu trin duro !

 

JOSEPH ROUMANILLE (1818 – 1891), Provinciales Fabellae, 1884 – 1889

MERLE ET MERLETTE

 
 

C’é(tait la veille de Noël ; Jacques Barral, de Pernes, était allé à la chasse et avait tué un merle. En arrivant chez lui :

- Tiens, Nanon, fait-il à sa femme, plume ça pour demain.

- Oh, dit Nanon, la belle merlette !

- C’est un merle, fait Barral.

- Eh ! tu ne vois pas que c’est une merlette ?

- Moi je te dis que c’est un merle !

- Et moi je te dis que c’est une merlette !

- Tu es un râbacheur !

- Et toi une imbécile.

- Oh ! cette carogne ! Je vais te…

- C’est une merlette !

- Ah ! c’est une merlette ? Eh bien ! attends…

Et pin ! et pan ! des claques, des griffades ! Coiffe d’un côté, chapeau de l’autre ! Quelle bagarre !

Pendant qu’ils se bagarraient, la chatte vola le merle… ou la merlette et s’esquiva. Cours-moi après !

 

II

 

L’année suivante, juste la veille de Noël, Barrau et Nanon allaient déposer la bûche dans l’âtre  et manger leurs escargots, quand Barrau :

« Ah ! Nanon, comme nous étions bêtes de nous secouer les puces, l’année dernière, jour pour jour, pour ce merle !

- Tu as bien raison. Moi je disais que c’était une merlette, non ? Eh bien ! va, c’en était sûrement une.

- C’était tout à fait un merle. Je le sais bien, moi qui l’ai tué.

- Mon beau, il me semble la voir : c’était une merlette.

- Tu en es encore avec ta merlette ? Que tu es entêtée, quand même !

- Que tu es têtu, Jacques !

- Tu te tairas, souillon !

- Oh ! sale individu ! avorton ! C’était une merlette !

- Ah ! c’était une merlette ! Eh bien ! je te…

Et pin ! et pan ! des claques, des griffades ! Coiffe d’un côté, chapeau de l’autre ! Quelle bagarre !

Et dire, quand même, qu’il y aura six ans pour Noël que cela dure !

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